Jumana Emil Abboud vit et travaille actuellement entre Jérusalem et Londres, où elle poursuit son doctorat à la Slade School of Fine Art, UCL.

Sa pratique créative s’intéresse au patrimoine immatériel et aux écosystèmes et communautés fragiles, afin d’explorer les mythes, de questionner la dépossession et d’imaginer l’épanouissement à travers la pratique artistique. Utilisant des matériaux variés tels que le dessin, la parole, le journal, la cire d’abeille, la broderie, la performance, la vidéo et les ateliers collaboratifs, le travail de Jumana au cours des deux dernières décennies s’appuie sur les contes populaires, le folklore de l’eau, la mémoire et les imaginaires collectifs, où les récits humains et les récits plus qu’humains sont interconnectés. Son travail s’inscrit dans un processus de reconnaissance, et de reconsidération du savoir oral, chargé tout à la fois d’un héritage spirituel et matériel, et offrant une extension de l’histoire par le tissage d’environnement vivant et non vivant, à travers une temporalité non linéaire.

Le Victoria & Albert Museum (Londres, Royaume-Uni) est partenaire de l’invitation de l’artiste, dans le cadre de son association au Cirva pour le lancement d’une résidence alliant une recherche sur la collection de verre du musée et une expérience directe du travail du verre au sein de l’atelier du Cirva. La résidence de Jumana Emil Abboud au V&A s’inscrit dans le programme Jameel Fellowship du musée.
 

💬 Note d’intention pour le Cirva, 2023
 Chères équipes du Cirva et du V&A,
Je vous remercie pour cette opportunité d’explorer, par des chemins empreints de douceur et de curiosité, des questionnements auxquels je porte une attention sérieuse et joueuse tout à la fois. Des sujets tels que la spiritualité, l’eau, le folklore et le collectif. À ce jour, la seule intention écrite que je puis proposer — et je ne cherche pas à faire preuve ici de clairvoyance [c’est une tout autre histoire], mais de réflexion [mon histoire préférée] — prend la forme de cette lettre dans laquelle
  Je recherche de l’eau
    et la manière dont elle peut être accessible à tous et toutes.
Une baguette de sourcier, grande, petite, ronde, épaisse, creuse, lourde, légère. Un puits, recueillant des gouttes de contraste, recherchant de quoi affirmer « source », ou « Saraya », ou « chéri ton amour ». C’est dans les fissures où le perpétuel remplace l’éternel que vous me trouverez, à la recherche de nos mythiques ruines enchantées. Une fontaine baignée de réverbération ; des réverbérations qui tintent dans le silence, et des silences qui ne demandent qu’à être tenus, perçus, entendus. Ce sera notre remède, pourrait-on dire. Que dirait une baguette sourcier, si elle pouvait s’exprimer à travers le folklore et l’artisanat ? Quand et où fera-t-elle ce que toutes les baguettes de sourcier font ? Et comment ? Par le biais d’une marche, d’une chanson, d’un tissage ? D’un vitrail miroitant le présent et le futur ? C’est un vaisseau, un mot lu de tous les côtés, un contenant, une armoire à étoiles, un œil [eye] (’ein ; ou ayn), et un endroit où retrouver cette imagination fantastique, et ramasser les morceaux de possible face à l’invraisemblable. C’est à tout cela, et à bien d’autres choses encore, qu’invite une étude dans le laboratoire du feu* ou une promenade parmi les dieux et les fantômes de nos histoires.
 
*peut faire allusion à la création par les cendres ou les fardeaux, ou au travail du verre
Raconter des histoires
 Verre et bois
  Baguettes de sourcier
Talismanique
  Amulette
  Votive
Kintsugi — réparation
Les choses les plus dures sont moulées par les mains les plus douces, l’eau.
 
Avec amour,
Jumana